Au cœur de Lomé, le grand marché d'Assigamé est plus qu'un simple lieu de commerce. C'est un microcosme de l'économie togolaise, lieu où opportunités et défis s'entrelacent. Des senteurs d'épices aux étals de tissus, chaque coin raconte l’histoire d’un certain entrepreneuriat féminin. Tout comme Assigamé, les artères de la ville des Nana Benz sont aujourd'hui émaillées de boutiques, d'entreprises et de stands créés ou gérés par des femmes. Qu'il s'agisse de l'agro-alimentaire, des produits de beauté, de l'habillement, de l'événementiel, du numérique ou du commerce en général, les femmes sont de plus en plus présentes partout où la richesse est créée et distribuée.

Cette visibilité croissante dans le paysage entrepreneurial de Lomé n'est pas un hasard. Elle est le résultat de plusieurs années de réformes ciblées visant à encourager l'entrepreneuriat féminin, soutiennent les autorités togolaises. "Les efforts et reformes économiques opérées depuis quelques  années, notamment dans le climat des affaires, l’appui aux jeunes, ou la mesure des 40% de commande publique aux jeunes et aux femmes ont été un catalyseur pour l'entrepreneuriat féminin," justifie Sandra Johnson, Ministre secrétaire générale de la Présidence en charge de la cellule climat des affaires. Mais, l'augmentation notable de la présence féminine dans le monde entrepreneurial n'est pas seulement le fruit des initiatives gouvernementales, soulignent des observateurs.  “Il faut y associer aussi une diminution des contraintes sociales, un changement progressif dans la mentalité collective, l’amélioration de l’éducation des femmes et une économie de plus en plus dynamique”, mentionne un consultant en Conseil d'entreprise-Assistance, basé à Lomé. 

Qu’importe ! En arpentant les artères de Lomé, “on sent ce vent de changement”. “Les  femmes ne sont plus seulement des vendeuses; elles deviennent de plus en plus des propriétaires, des actionnaires et des associées dans divers types d'entreprises”, raconte un autre spécialiste de la gestion d’entreprise, qui dirige son propre cabinet comptable.  

Et les chiffres parlent. Des données du CFE (Centre de Formalités des Entreprises) montrent que le nombre de femmes propriétaires d'entreprises individuelles au Togo a augmenté de 24,18% entre 2018 et 2022, contre seulement 6,89% chez les hommes. Le chiffre est encore plus impressionnant pour les SARL, où l'augmentation est de 114,8%. "Nous avons réduit les coûts et les délais de création d'entreprise, sauté le verrou du capital minimum,  et modernisé l'administration fiscale. C'est l'effet cumulatif de ces petites mais significatives étapes qui a contribué à cette montée en puissance," ajoute Sandra Johnson. Et là encore, on ne parle pas du secteur informel où la présence des femmes est encore plus marquée. 

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Les visages de la révolution

Aïssatou, une créatrice de mode, est un de ces visages. "Avant, les procédures étaient tellement compliquées. Mais maintenant, créer une entreprise se fait facilement, les choses se digitalisent, ce qui me permet de me concentrer sur ce que je fais de mieux : créer," se rejouit-elle, tout en arrangeant ses créations.

À quelques mètres de là, Kafui, une entrepreneure engagée dans la transformation agricole, partage un sentiment similaire. Spécialisée dans la production de jus de fruits bio, elle tente “maintenant d’étendre” son “business”. 

Kpémissi Solim à la tête de Fruits of Africa basée à Lomé a, quant à elle, bénéficié d’un financement du PNUD.  Pour cette entrepreneure qui est dans la transformation, cet apport financier servira à “ériger une nouvelle infrastructure, à investir dans un séchoir en inox plus résilient et à élargir son effectif, passant de 12 à 20 collaborateurs”.

Dans l'écosystème entrepreneurial du Togo, elles sont nombreuses ses figures emblématiques qui se distinguent et  donnent du sens au rêve de l’initiative feminine : Nadiaka, Mablé Agbodan, Vincenzia Meyer, la regrettée Dédé Rose Creppy, l'une des dernières "Nana Benz", Maryse Adotevi, qui occupe actuellement le poste de Managing Partner chez Deloitte Togo,  ou  Amina Azia Ouro-Agoro de Minagro…

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En pole position

Cette tendance à “l’épanouissement féminin” prend une ampleur particulière lorsque l'on mesure le progrès des femmes au Togo en regard des statistiques à l'échelle du continent africain. Selon l'indice Femmes, Entreprises et Droit de la Banque mondiale, le Togo se hisse à la 7e place sur le continent. Il n’est devancé que par des nations comme l'île Maurice, l'Afrique du Sud, le Zimbabwe, le Cap Vert, la Tanzanie et la Namibie.

Dans le cadre plus spécifique de l'Afrique de l'Ouest, le Togo est un leader régional, se positionnant comme la deuxième nation la plus engagée en faveur de l'égalité des chances entre hommes et femmes, juste derrière le Cap Vert.

"Ces résultats ne sont pas qu'un simple écho de nos efforts, mais bien le reflet d'une réalité en pleine transformation. Les réformes initiées visent à créer un environnement dans lequel les femmes peuvent non seulement créer des entreprises, mais également accéder aux ressources financières nécessaires pour les développer, et surtout s’épanouir" précise Sandra Johnson.

Une économie en pleine croissance

Alors que l’économie togolaise devrait connaître une croissance de 6,6% en 2023, les femmes prennent de plus en plus de place dans cette dynamique. "Les femmes sont celles qui se chargent des ménages; une croissance dans leurs activités est forcément signe que nos populations se porteront de mieux en mieux. Nous sommes certains que c'est le curseur pour parvenir à un développement harmonieux," souligne une autorité locale. Justifiant l’impact des réformes initiées au niveau gouvernemental sur l'augmentation du nombre de femmes entrepreneures. 

Alors que l'élan entrepreneurial est indéniable, un autre indicateur mérite une attention particulière : le financement. Selon les données récentes de l'Association des Banques et Etablissements Financiers du Togo (ABEFT), les montants moyens des prêts accordés aux femmes sont souvent supérieurs à ceux accordés aux hommes. “Ce n'est pas une mince affaire, surtout dans un contexte où l'accès au financement est souvent cité comme un obstacle majeur à l'entrepreneuriat féminin”, fait remarquer un banquier togolais contacté par Togo First.  

Cette tendance démontre non seulement un niveau de confiance accru des institutions financières envers les entrepreneures, mais aussi un changement progressif dans la dynamique de genre en matière de financement.

"Ce n'est pas un hasard si les montants des prêts accordés aux femmes sont en moyenne plus élevés," assure notre banquier, poursuivant que les statistiques montrent qu’elles “remboursent beaucoup plus que les hommes”. Une donnée que Togo First a pu confirmer également en compilant les données de l'Association des Banques et Etablissements Financiers du Togo (ABEFT). 

Pour Sandra Johnson, "cela reflète la confiance croissante dans le potentiel entrepreneurial des femmes et leur capacité à rembourser ces prêts, ce qui est un signe extrêmement positif pour l'avenir de l'économie togolaise."

Malgré cette dynamique positive en faveur des femmes, le chemin est encore long à parcourir pour combler les  disparités entre hommes et femmes. Les femmes restent encore minoritaires dans la création d'entreprises. 

Par exemple, en 2022, le nombre de propriétaires masculins de nouvelles entreprises individuelles s'élevait à 5 691 contre 2 717 pour les femmes. De même, en ce qui concerne les SARL, on comptait 4 107 nouveaux propriétaires masculins contre 1 074 propriétaires féminins. De plus, il existe encore des secteurs où la présence féminine est quasi-absente, comme la technologie et la construction. Ces statistiques rappellent que, malgré les avancées notables, un travail reste à faire pour atteindre une véritable parité entre hommes et femmes dans l'entrepreneuriat au Togo.

Mais comme le souligne Sandra Johnson, "Nous devons continuer à encourager les femmes à prendre plus de responsabilités, à devenir actionnaires ou associées." 

Fiacre E. Kakpo

Le Collectif des Associations Contre l'Impunité au Togo (CACIT) et l’Organisation Mondiale Contre la Torture (OMCT), organisent du 20 au 27 octobre au Nunya Lab Lomé, un hackaton dénommé Tech 4D Rights (Tech for Detainees Rights). 

Il s’agit d’une compétition tech et d'innovation qui cible en priorité les étudiants, les startupers et les organisations de la société civile. L'objectif affiché par les organisateurs est d’impulser le développement de solutions numériques, dans un contexte de pandémie, en vue d’“apporter des solutions technologiques innovantes pour l'amélioration des conditions de vie et de détention des détenus”, apprend-on. 

Si une quinzaine d’équipes qui devraient participer à ce hackathon, seules une demi-dizaine verront leurs projets passer en finale où elles tenteront de gagner l’un des deux prix respectivement fixés à 500 000 FCFA et 300 000 FCFA. “Les solutions développées peuvent être : un logiciel, un site web, une application mobile, un appareil électronique, un produit, un service” précisent le CACIT. 

Notons que les inscriptions sont ouvertes en ligne jusqu’au 10 octobre prochain via ce lien.

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Publié dans TIC

Des startups des pays membres de l’Union Économique et Monétaire Ouest-Africaine (UEMOA) pourront bénéficier de soutiens financiers pour booster leurs activités en participant à la 2è édition du Concours « Tremplin Startup Uemoa » lancée le 24 septembre dernier.

Dans l’ordre de mérite, les cinq meilleures jeues pousses empocheront 14 millions Fcfa, 13 millions Fcfa, 12 millions Fcfa, 11 millions Fcfa et 10 millions Fcfa, informe la commission de l’Uemoa dans un communiqué. Les 3 meilleures startups de chaque pays recevront pour leur part, un prix d’encouragement d’un montant de 5 millions FCFA chacune.

La compétition organisée par la Commission de l’Uemoa en partenariat avec la Chambre consulaire régionale de l’Uemoa (CCR-Uemoa) et les Chambres consulaires nationales (CCn) des États membres de l’Uemoa, est ouverte uniquement aux startups formellement créées après le 1er janvier 2017 et en activité dans l’espace sous régional. Elle cible les entreprises qui se servent du numérique pour contribuer à rendre le secteur agro-industriel plus performant.

Globalement, il s’agit pour la commission de l’Uemoa via cette compétition, de faire la promotion de l’entrepreneuriat moderne et innovant ainsi que de soutenir les efforts des structures d’accompagnement à l’entrepreneuriat de la sous-région, indique-t-on.

L’appel à candidatures est ouvert jusqu’au 25 octobre et Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.. Mais préalablement, les candidats devraient remplir le formulaire de candidature disponible dans les chambres consulaires nationales.

Pour rappel, en 2020 lors de la première édition, c’était la Start-Up TECO2 du Burkina Faso qui s’était adjugé le premier prix. 

Esaïe Edoh 

« La fabrication de chaussures est une passion que j’ai développée dans mon enfance ; à 10 ans, je faisais la réparation. À 15 ans, l’inspiration de créer une chaussure m’a saisi et je me suis donné de manière obstinée ».

À l’état-civil Ayouguele, Kudjukabalo est un entrepreneur togolais spécialisé dans la fabrication de chaussures fermées et mocassins. Juriste de formation à l’Université de Kara au Togo, ce jeune créatif avait déjà choisi son métier de carrière avant même d’aller à l’université : la fabrication de chaussures.

À 10 ans, alors qu’il était à l’école primaire, Ayouguele réparait les chaussures pour ses parents et amis. Puis un jour, il proposa de réparer celles de son maître de classe. « En réparant ses chaussures, je me suis permis de faire une retouche, il en était très content » nous confie Ayouguele qui, depuis lors, a été surnommé Jean-le-Génie.

« La première paire de chaussures que j’ai fabriquée n’était pas du tout parfaite, mais j’en étais très fier. Ensuite, j’ai eu un mentor, Morou Mahamodou, qui m’a aidé à me perfectionner » se souvient-il.

En juin 2014, il lance son entreprise de fabrication et de commercialisation de chaussures, Shoes House Production (SHP-Shop). « Nous fabriquons des chaussures pour homme et femme, présidentielles, types fermés, mocassins, babouches, et les nu-pieds ». C’est très difficile d’écouler des chaussures de fabrication artisanale mais « nous nous sommes battus par passion pour ce métier et nous avons pu nous tailler une part de marché aujourd’hui, Dieu merci », se réjouit l’entrepreneur qui a maintenant 30 ans.

Jean-le-Génie participe à des foires-expositions, des festivals d’arts grâce auxquels il parvient à vendre sa production. En 2019, il a été sélectionné pour prendre part au programme américain Young African Leaders Initiative (Yali RLC) initié par l’ex-président américain Barack Obama au profit des jeunes Africains.

« Mon ambition est d’acquérir des machines me permettant de décupler ma production. Mais mon label sera toujours artisanal, c’est ce que nos clients aiment », indique Jean-le-Génie, qui estime que le secteur de la fabrication artisanale de chaussures est prometteur et mérite le soutien des autorités publiques.

Youssouf Sériba

Le successeur du Togolais, Dodji Ognankitan, lauréat du dernier concours « Neofarming Africa », sera connu au cours du forum « les Rencontres Africa » prévu du 30 novembre au 2 décembre 2021 prochain à Lomé. Le comité d’organisation a ouvert jeudi dernier les inscriptions pour le compte de l’édition 2021. 

Les entreprises du secteur de l’agriculture et de l’agroalimentaire de la sous-région qui souhaitent développer des innovations ou des projets porteurs, peuvent jusqu'au 20 novembre prochain, soumettre leurs projets via la nouvelle plateforme  dédiée à l’événement.

En effet, le lauréat sera choisi sur la base de propositions de solutions qui visent à relever des défis agricoles spécifiques en Afrique. Le porteur du meilleur projet bénéficiera d’un appui à sa réalisation, à l’instar du Togolais qui a installé une usine de transformation du manioc en gari pour la consommation et en amidon pour les industries pharmaceutiques. Celui-ci avait décroché lors de l’édition précédente, le prix mis en jeu, soit une enveloppe de 20 000 € (13 millions FCFA).  

Pour rappel, le « Neofarming Africa » est un mouvement qui rassemble de nombreux professionnels reconnus des institutions financières. Il a vocation à contribuer à l’identification et à l’émergence des meilleurs projets et intervient dans le cadre de l’organisation des « Rencontres Africa ».

Esaïe Edoh

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